Je vous reposte ici un article de Roland Laskine
Depuis le début des années 2010 les valeurs américaines font la course en tête. Le phénomène est bien connu, rien de nouveau sous le soleil. Sur toute cette période, l'indice S&P 500 a affiché une surperformance annuelle moyenne de l'ordre de 10% par rapport à l'indice de référence de la Bourse de Paris. L'écart s'explique par la montée en puissance des valeurs technologiques au sein de la cote américaine et par un potentiel de croissance économique presque deux fois supérieur au nôtre. Aujourd'hui, il n'est cependant plus question de sous-performance, mais de contre-performance en valeur absolue. En clair, quand Wall Street monte, le CAC 40 n'est pas seulement à la traîne, il recule ! Sur les 12 derniers mois, alors que l'indice S&P 500 a progressé de 30,4%, nous baissons de 0,4%. L'écart est sidérant… du jamais vu de mémoire de boursier. L'indice Eurostoxx 50 a mieux résisté. Toutefois, avec une progression d'un peu plus de 9,2% sur la même période, il reste lui aussi très en retard par rapport à Wall Street.
Inutile de remuer le couteau dans la plaie pour comprendre pourquoi nos valeurs subissent un tel affaissement (faible croissance, perte de compétitivité, dégradation des comptes publics, etc…). Pour ne rester que dans la sphère boursière, la cote française manque cruellement de valeurs technologiques en forte croissance capables de tirer nos indices vers le haut. Pas de Nvidia, de Microsoft ou d'Apple de ce côté-ci de l'Atlantique. Notre CAC 40 est composé de sociétés traditionnelles de grande qualité, mais aucune d'elles ne dispose d'un potentiel de valorisation comparable à celui des « 7 magnificients ». Ces sept géants de la « tech » américaine présentent à eux seuls 47% des dépenses d'investissement des cinq cents sociétés de l'indice S&P 500 et un tiers de la totalité des profits de l'indice.
Avec nos champions du luxe, nous avons longtemps cru disposer de nos propres « magnifiques ». Il a suffi que les Chinois lèvent le pied sur leurs achats de sacs de luxe, de parfums « made in France », de Cognac et de Champagne pour que nos LVMH, Hermès International, Kering et autre L'Oréal perdent de leur superbe. A la différence des valeurs technologiques cotées sur le Nasdaq, disposant d'une dynamique de croissance endogène, les nôtres sont à la merci de l'humeur et des retours de fortune de leur clientèle. Autre élément troublant, les valeurs européennes ne profitent plus de la hausse du dollar, pourtant traditionnellement favorable. La hausse de 5% du billet vert par rapport à l'euro sur les trois derniers mois, qui permet à nos entreprises de bénéficier d'un effet de change positif, n'a cette fois-ci eu aucun effet sur le cours de Bourse de nos grands exportateurs.
Dans ce contexte, nous nous félicitons tous les jours, d'avoir orienté très tôt nos portefeuilles vers les grandes valeurs américaines. Sur les 12 derniers mois tous nos portefeuilles affichent une performance positive. Le meilleur score (+13,5% sur un an glissant) revient à notre sélection d'ETF Monde par nature orientée vers une gestion diversifiée de nos actifs. L'essentiel de la performance provient de l'achat de deux trackers Amundi éligibles au PEA, l'un indexé sur le S&P 500 et l'autre sur le Nasdaq ainsi que des positions prises sur les valeurs d'assurance de la zone euro qui ont très bien résisté à la baisse. Notre tentative de diversification sur le marché chinois, avec l'achat du tracker Amundi PEA MCSI China, en recul de plus de 5%, est moins heureuse. La sélection ISR/PEA (+10,4%) et le portefeuille Offensif (+6,64%) nous donnent également pleine satisfaction. Le Défensif doit en revanche se contenter d'une progression plus modeste de 1,9%.
Cette semaine, nous avons encore réduit les positions sur l'ensemble de nos portefeuilles, en raison de la forte hausse de la volatilité sur les actions françaises. Les principaux désengagements ont porté sur Air Liquide, Axa, L'Oréal et Hermès International. Au niveau européen, nous avons alléger les positions sur les valeurs allemandes, Henkel, Zalando et Hannover Re, ainsi que sur l'assureur néerlandais Aegon et le géant des produits ménagers Unilever tous deux cotés à la Bourse d'Amsterdam. La semaine précédente, nous avions par ailleurs déjà pris une partie de nos profits sur les ETF Amundi PEA Nasdaq 100 et Amundi PEA S&P 500, en raison là aussi de l'inflexion intervenue à Wall Street, après l'euphorie des premiers jours ayant suivi l'élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis.
Quelle stratégie d'ici à la fin de l'année ? Il reste exactement 24,5 jours avant la clôture de l'année le 31 décembre à la mi-séance. A partir de là deux solutions sont envisageables. L'une très optimiste consiste à se dire qu'il est encore possible de se refaire en jouant un possible « rally » de fin d'année. Après tout, rien n'interdit de penser, qu'après un exercice aussi calamiteux que celui que nous venons de connaître, les valeurs françaises puissent bénéficier d'un ultime sursaut avant la saint Sylvestre. L'autre version, moins joyeuse, consiste à penser que dans l'esprit de nombreux investisseurs l'année est « déjà faite » et qu'il est trop tard pour prendre de nouvelles initiatives. Au risque de passer pour de bien tristes sires, nous préférons opter pour la seconde solution. Celle-ci consiste à conserver une stratégie très conservatrice, avec pour principal objectif de préserver l'avance prise par nos portefeuilles Offensif, Monde et ISR/PEA. En cas de bonne surprise liée à une remontée des indices en cours des dernières séances de l'année, nous nous contenterons d'accompagner le mouvement de façon très prudente, en conservant un important volant de liquidités. Aujourd'hui, la stratégie de gestion d'un portefeuille boursier doit autant se soucier de la diversification géographique des actifs sur plusieurs marchés, notamment à Wall Street ou en Asie, que d'une démarche traditionnelle de choix de valeurs au sein d'un seul marché, comme à la Bourse de Paris. C'est à cette réflexion qu'il va falloir s'atteler au cours des prochaines semaines.
Bonne lecture et bon week-end à tous,
Roland Laskine