Trader et investir sont 2 choses radicalement différentes.
Tout est question de probabilité.
Un actionnaire de Microscoft aujourd'hui est, je pense, mille fois plus serein qu'un actionnaire d'Atos, qui risque clairement une dilution massive maintenant que l'AK avec DPS n'est plus d'actualité.
J'ai un investissement en perte, plus grande que mes pertes matérialisées sur Atos, mais sur lequel je suis serein. Pas sur le fait que je retrouverai mon argent sous peu, mais sur le fait que l'entreprise ne va pas disparaître demain, ou que je serai dilué à 99% sous 6 mois.
La probabilité pour que les actionnaires d'Atos subissent une dilution massive est maintenant proche de 100%. Cela a même été évoqué dans leur dernier communiqué. Additionné au fait qu'Atos ne dit normalement jamais rien, et que Mustier a déclaré que l'actionnaire passerait en dernier, après les banques et les obligataires, je le répète : je ne comprends pas comment on peut rester actionnaire d'Atos.
Trader oui, investisseur, non.
Déjà, ce n'est pas des probabilités. Une probabilité n'a de sens que mathématique et dans un monde fermé. Ici vous êtes dans un monde ouvert et surtout vous êtes dans un monde ici dominé par la volonté. La volonté des concurrents d'Atos pour racheter ou non les actifs. La volonté politique de maintenir Atos ou non, et enfin une volonté plus large liée à des mécanismes économiques basiques. D'un point de vue élémentaire, avec une inflation qui est maintenant inférieure à 3%, ce n'est pas mécanique de maintenir les taux à 4,5%, c'est une décision. Ou la volonté/panique des clients de ne plus signer aucun contrat.
Le marché obligataire sort de plus de dix ans de taux faibles, une ouverture conciliante serait ici un simple rebond technique lié à la mémoire des obligations à taux très faibles.
Enfin, il faut lire la phrase complète, évoquer une possibilité, ce n'est pas écrire une nécessité. La même phrase dit qu'Atos devra alors vendre des actifs ou accéder au marché des capitaux, ou risque de dilution.
La vente des actifs n'est ni certaine, ni obligatoire, mais elle est possible.
La reconduction du prêt bancaire A n'est ni nécessaire, ni impossible. Clariane a bien repoussé ses échéances.
Le marché obligataire n'est pas fermé, j'ai vérifié de nombreux exemples parmi des sociétés bien plus endettées qu'Atos.
Atos n'est pas une société en dehors du monde, elle est soumise à une valorisation sectorielle qui ne connait pas la crise (contrairement au real estate, contrairement à la grande distribution (en crise depuis 2008)).
On a eu les créanciers qui ont suspendu la dette en attendant de meilleurs jours.
On a eu les créanciers qui ont repoussé l'échéance de la dette jusqu'en 2027 et qui ont même refinancé l'entreprise sans dilution.
On a eu les créanciers qui ont prêté à nouveau dès 2023. Et 2024 devrait signifier une détente du marché obligataire.
On a eu les créanciers qui n'ont pas voulu refinancé mais ont dilué les actionnaires existants.
On a eu les créanciers qui ont tout simplement refusé de négocier la dette et ont fait couler la boîte.
On a eu enfin l'apporteur de liquidité qui a court-circuité créanciers et actionnaires.
A vrai dire, Orpea et Casino ne sont pas la règle. On a un problème moral en premier (car je doute que Clariane n'ait pas les mêmes scandale en puissance), et Casino c'est un problème sectoriel avant tout. Et si Daniel K. savait que Casino serait dans cette situation, je ne suis pas sûr qu'il aurait brûlé 200 millions d'euros.
Pour croire en Atos:
Le chemin est tellement simple que je ne sais même pas comment les autres ne le voient pas.
Atos n'est pas UNE mais DEUX sociétés, on peut la voir même comme une holding.
A l'intérieur de cette société, on a deux actifs de valeur plus ou moins certaine. Il existe la notion de dette "sécurisée" auquel Atos n'a jamais fait appel.
L'obligation de 2021 à échéance 2028 est une obligation en partie basée sur des contraintes écologiques à respecter.
Le marché obligataire est riche d'une forte inventivité.
La BPI a déjà été un fond vautour sur Orpea, va-t-elle le faire aussi sur Atos?
Si Mustier, artiste des dérivés ne joue pas l'inventivité obligataire on pourra tout de même s'étonner qu'une "belle société" soit détruite en 3 ans.
Donc une vente d'actif important, quelques actifs secondaires (ce qu'Atos a énoncé, vendre BDS ainsi que d'autres actifs non core, et Atos garderait une consistance), une levée obligataire sécurisée par des actifs, pourquoi ne pas voir cet aspect là?
Je trouve cela très surprenant.
Enfin Mustier n'a qu'à respecter un cadre juridique. Et dans ce cadre juridique l'actionnaire n'est pas prioritaire. C'est une base. Donc pourquoi irait-il contre la loi?
Les journalistes racontent souvent n'importe quoi, pourquoi en irait-il de Mustier?
Dire une évidence n'est pas informer le marché du futur.
De plus, il n'est responsable que de très peu de choses, d'avoir suivi le plan Meunier, sachant qu'il venait d'arriver, et il a infléchi le plan assez rapidement. Plan Meunier qui en soi est bien meilleur qu'une dilution maximale des actionnaires.
Par contre, le risque est presque maximal, cela dépasse la sphère financière, les mécaniques deviennent donc encore plus aléatoires.
Enfin c'est un type de trading/investissement, et les résultats sont à la mesure du risque.
Autre argument lié à la volonté politique, les JO. Ce n'est vraiment rien, mais techniquement en juillet Atos peut être en faillite. Certes, ils n'ont pas la puissance des agriculteurs mais tout de même, après la finale au stade de France, le savoir faire informatique français en prendrait un petit coup.
Enfin, dernier argument d'autorité, Layani n'est pas un trader, c'est un investisseur. Et Layani est bien petit et je ne le vois pas passer devant Sopra, CapGemini et autres, surtout qu'on ajouterait à tout ce soap opera, un scandale de favoritisme ou de conflit d'intérêt. Il aurait acheter son billet pour la reprise finale.
Ce n'est pas impossible bien sûr, mais j'espère que la France n'est pas à ce point dans un inceste de l'entre soi. Je ne vois pas Atos se faire brader aux enchères pour 1 milliard 200 millions.
Donc c'est sympa de rire des fantasmeurs "to the moon", et je ne dis pas que votre analyse ne réalisera pas, c'est même de plus en plus sûr.
Pour valider votre lecture, j'ai même une autre société qui a non pas 3/4 milliards de dette mais 20 voire 25 milliards de dette, et un fond vient d'écrire au dirigeant qu'il vivait dans la lune. Qu'il n'était pas dans le réel car il n'a passé aucune dépréciation d'actifs (contrairement à Atos qui la joue un peu plus honnête), imaginez, je crois qu'il valorise les actifs à 40 milliards alors que ces mêmes actifs perdent plusieurs centaines de millions, en fait je crois que rien que les intérêts de la dette, c'est 1 milliard par an. Alors il vient de se prendre un non pour reconduire l'échéance de plusieurs obligations mais ce n'était que le premier coup, et comme par magie, il joue sur la sécurisation des actifs pour lever de la dette. Encore pire, il doit lever 7 milliards de dette en 2024 pour respecter une obligation contractuelle alors même qu'il n'a pas réussi à reconduire 2/3 milliards jusqu'en 2030.