J'ai accueilli avec beaucoup de déception, comme la plupart d'entre nous, les derniers résultats semestriels d'Atos.
Comme beaucoup, j'étais actionnaire (et lourdement investi), hier matin.
Les résultats m'ont apparu immédiatement comme catastrophiques et j'ai pris la décision de vendre tous mes titres dès les premiers échanges à 9h.
Pourquoi je ne crois plus en Atos aujourd'hui ?
Au-delà du manque de confiance en la direction, qui a manifestement maquillé les comptes fin 2022 pour embellir la mariée et espérer refourguer 30% d'Eviden à Airbus, mon scepticisme se nourrit aujourd'hui de raisons plus fondamentales.
Pour le dire rapidement, et quelles que soient les hypothèses que l'on puisse formuler s'agissant de la nécessité d'une augmentation de capital, je ne crois plus à l'idée qu'Atos - ou l'une de ses entités - puissent être dans un avenir proche (i.e avant 2026) une société rentable.
Pour comprendre ce point, il faut se pencher de manière lucide sur le dernier compte de résultats.
Je fais l'hypothèse (optimiste) que Tfco sans dettes vaut actuellement zéro euro.
C'est une hypothèse optimiste, puisque les rumeurs de marché faisaient plutôt état d'une cession de Tfco pour 400 millions d'€, ce qui donne une valorisation négative à l'instant t.
Il convient de rappeler que de nombreuses charges de restructuration restent encore à exécuter sur le périmètre de Tfco, et que, malgré ces charges, l'entité :
1/ va continuer à perdre de l'argent en 2024, et sans doute en 2025
2/ ne sera légèrement rentable qu'à partir de 2026.
Le point important de la présentation du dernier market day, on n'y insistera jamais assez, est que la direction a présenté des projections de fcf positif en 2025 avant intérêts et impôts. Avant 2026, Tfco continuera donc à dégager un fcf réel (après intérêts et impôts) négatif. Il y a évidemment beaucoup d'incertitudes sur la période ultérieure, mais une valorisation de tfco à zéro me semble relativement raisonnable, et même plutôt optimiste.
Passons donc désormais à Eviden.
Si la scission est exécutée conformément au plan, Eviden devrait "bear most of the debt" - c'est à dire environ 2,4 à 2,6 milliards à fin 2024. Je fais une hypothèse théorique de scission à fin 2024 pour intégrer toutes les charges de restructuration et faciliter le calcul, mais on peut très bien supposer qu'Eviden laissera de la trésorerie dans Tfco et que la scission sera exécutée avant (cela revient au même sur le plan comptable).
En 2024, selon une estimation très optimiste et généreuse, nous aurons donc une société qui fera environ 5,8 milliards de CA avec une mop de 7%.
Personnellement, je ne crois pas à la possibilité d'atteindre cette mop en 2024, mais gardons cette hypothèse.
La "marge opérationnelle" d'Eviden-Atos, pour reprendre la nomenclature - par ailleurs fort alambiquée - d'Atos, sera donc de 410 millions d'€ environ.
Dans une société normale, il suffit de retrancher à l'ebit les charges financières et les impôts pour obtenir le résultat net. Le compte de résultat d'Atos étant plus complexe, il faut passer de la "margé opérationnelle" au "résultat opérationnel" en essayant de retrancher au mieux les éléments dits exceptionnels.
En comparant les résultats de 2017, 2018, 2019 et 2020, j'ai pu constater qu'il existait un certain nombre d'éléments récurrents :
-des frais d'organisation, autour de 140 millions annuels en moyenne
-des frais de rationalisation, autour de 60 millions annuels en moyenne
-des amortissements d'immobilisations incorporelles récurrentes d'environ 120 millions annuels en moyenne
-des charges relatives à des paiements fondés sur des actions d'environ 30 millions annuels en moyenne
-des autres éléments d'environ 60 millions annuels en moyenne
J'insiste sur le fait que ce sont des lignes récurrentes sur tous les comptes de résultats d'Atos. Cela ne tient pas compte des charges exceptionnelles liées aux restructurations pré-scission. Vous pourrez le vérifier vous même en regardant les comptes de résultat des années 2017, 2018, 2019, 2020 etc.
Nous allons faire une hypothèse très optimiste et imputer à Eviden seulement la moitié de ces charges (c'est très optimiste car ces dernières années les amortissements d'immobilisations incorporelles et autres éléments, notamment des frais juridiques ou des frais de scission/acquisition étaient surtout logés dans Eviden).
Nous arrivons donc à un total de 205 millions (additionner toutes les lignes et diviser par 2).
Le résultat opérationnel d'Eviden en 2024 pourrait être autour de 205 millions d'€
Il faut y retrancher ensuite :
-les impôts : autour de 75 millions (à nouveau issu des données recoupées, et c'est toujours une hypothèse optimiste, fondée sur un taux à 18,5%)
-les charges financières : celle-ci a commencé à sévèrement augmenté pour atteindre 40 million au s1. Pour une dette logée en totalité dans Eviden, nous avons donc 80 millions d'€ annuels.
Soit un résultat net de : 205 - 75 - 80 = 50 millions d'€.
Alors on se dira : mais oui, mais le CA d'Eviden augmentera en 2025-2026, ainsi que la mop !
Certes mais le coût de l'endettement augmentera sévèrement aussi.
4,5 milliards de dette brute (car ce n'est pas la dette nette qu'on refinance) entre 5 et 8% donneraient une charge financière entre 247 et 360 millions ! Il faudra donc une très belle augmentation du CA et de la MOP pour combler l'accroissement progressif du coût de la dette.
Mais surtout, le plus fondamental.
Pourquoi ne valoriserait-on pas Atos/Eviden sur les mêmes bases que ses pairs ?
Pour comparaison, 3 ESN de taille et de structures très différentes :
Capgemini se paye aujourd'hui à un PER d'environ 13x sur les bénéfices attendus 2024
Sopra Steria se paye aujourd'hui à un PER d'environ10,5x sur les bénéfices attendus 2024
Nextedia se paye aujourd'hui à un PER d'environ 8x sur les bénéfices attendus 2024.
Et ces trois sociétés ont une croissance de CA plus forte que celle d'Eviden seule (je ne parle même pas du groupe Atos dans son ensemble)
Eviden surendettée, sur la base d'un PER théorique très généreux de 12x ses bénéfices 2024 devrait se payer environ 700 millions d'€ (pour une valeur d'entreprise de 3,5 milliards environ), soit un cours de bourse autour de 7-8€/action.
Comme beaucoup, j'étais actionnaire (et lourdement investi), hier matin.
Les résultats m'ont apparu immédiatement comme catastrophiques et j'ai pris la décision de vendre tous mes titres dès les premiers échanges à 9h.
Pourquoi je ne crois plus en Atos aujourd'hui ?
Au-delà du manque de confiance en la direction, qui a manifestement maquillé les comptes fin 2022 pour embellir la mariée et espérer refourguer 30% d'Eviden à Airbus, mon scepticisme se nourrit aujourd'hui de raisons plus fondamentales.
Pour le dire rapidement, et quelles que soient les hypothèses que l'on puisse formuler s'agissant de la nécessité d'une augmentation de capital, je ne crois plus à l'idée qu'Atos - ou l'une de ses entités - puissent être dans un avenir proche (i.e avant 2026) une société rentable.
Pour comprendre ce point, il faut se pencher de manière lucide sur le dernier compte de résultats.
Je fais l'hypothèse (optimiste) que Tfco sans dettes vaut actuellement zéro euro.
C'est une hypothèse optimiste, puisque les rumeurs de marché faisaient plutôt état d'une cession de Tfco pour 400 millions d'€, ce qui donne une valorisation négative à l'instant t.
Il convient de rappeler que de nombreuses charges de restructuration restent encore à exécuter sur le périmètre de Tfco, et que, malgré ces charges, l'entité :
1/ va continuer à perdre de l'argent en 2024, et sans doute en 2025
2/ ne sera légèrement rentable qu'à partir de 2026.
Le point important de la présentation du dernier market day, on n'y insistera jamais assez, est que la direction a présenté des projections de fcf positif en 2025 avant intérêts et impôts. Avant 2026, Tfco continuera donc à dégager un fcf réel (après intérêts et impôts) négatif. Il y a évidemment beaucoup d'incertitudes sur la période ultérieure, mais une valorisation de tfco à zéro me semble relativement raisonnable, et même plutôt optimiste.
Passons donc désormais à Eviden.
Si la scission est exécutée conformément au plan, Eviden devrait "bear most of the debt" - c'est à dire environ 2,4 à 2,6 milliards à fin 2024. Je fais une hypothèse théorique de scission à fin 2024 pour intégrer toutes les charges de restructuration et faciliter le calcul, mais on peut très bien supposer qu'Eviden laissera de la trésorerie dans Tfco et que la scission sera exécutée avant (cela revient au même sur le plan comptable).
En 2024, selon une estimation très optimiste et généreuse, nous aurons donc une société qui fera environ 5,8 milliards de CA avec une mop de 7%.
Personnellement, je ne crois pas à la possibilité d'atteindre cette mop en 2024, mais gardons cette hypothèse.
La "marge opérationnelle" d'Eviden-Atos, pour reprendre la nomenclature - par ailleurs fort alambiquée - d'Atos, sera donc de 410 millions d'€ environ.
Dans une société normale, il suffit de retrancher à l'ebit les charges financières et les impôts pour obtenir le résultat net. Le compte de résultat d'Atos étant plus complexe, il faut passer de la "margé opérationnelle" au "résultat opérationnel" en essayant de retrancher au mieux les éléments dits exceptionnels.
En comparant les résultats de 2017, 2018, 2019 et 2020, j'ai pu constater qu'il existait un certain nombre d'éléments récurrents :
-des frais d'organisation, autour de 140 millions annuels en moyenne
-des frais de rationalisation, autour de 60 millions annuels en moyenne
-des amortissements d'immobilisations incorporelles récurrentes d'environ 120 millions annuels en moyenne
-des charges relatives à des paiements fondés sur des actions d'environ 30 millions annuels en moyenne
-des autres éléments d'environ 60 millions annuels en moyenne
J'insiste sur le fait que ce sont des lignes récurrentes sur tous les comptes de résultats d'Atos. Cela ne tient pas compte des charges exceptionnelles liées aux restructurations pré-scission. Vous pourrez le vérifier vous même en regardant les comptes de résultat des années 2017, 2018, 2019, 2020 etc.
Nous allons faire une hypothèse très optimiste et imputer à Eviden seulement la moitié de ces charges (c'est très optimiste car ces dernières années les amortissements d'immobilisations incorporelles et autres éléments, notamment des frais juridiques ou des frais de scission/acquisition étaient surtout logés dans Eviden).
Nous arrivons donc à un total de 205 millions (additionner toutes les lignes et diviser par 2).
Le résultat opérationnel d'Eviden en 2024 pourrait être autour de 205 millions d'€
Il faut y retrancher ensuite :
-les impôts : autour de 75 millions (à nouveau issu des données recoupées, et c'est toujours une hypothèse optimiste, fondée sur un taux à 18,5%)
-les charges financières : celle-ci a commencé à sévèrement augmenté pour atteindre 40 million au s1. Pour une dette logée en totalité dans Eviden, nous avons donc 80 millions d'€ annuels.
Soit un résultat net de : 205 - 75 - 80 = 50 millions d'€.
Alors on se dira : mais oui, mais le CA d'Eviden augmentera en 2025-2026, ainsi que la mop !
Certes mais le coût de l'endettement augmentera sévèrement aussi.
4,5 milliards de dette brute (car ce n'est pas la dette nette qu'on refinance) entre 5 et 8% donneraient une charge financière entre 247 et 360 millions ! Il faudra donc une très belle augmentation du CA et de la MOP pour combler l'accroissement progressif du coût de la dette.
Mais surtout, le plus fondamental.
Pourquoi ne valoriserait-on pas Atos/Eviden sur les mêmes bases que ses pairs ?
Pour comparaison, 3 ESN de taille et de structures très différentes :
Capgemini se paye aujourd'hui à un PER d'environ 13x sur les bénéfices attendus 2024
Sopra Steria se paye aujourd'hui à un PER d'environ10,5x sur les bénéfices attendus 2024
Nextedia se paye aujourd'hui à un PER d'environ 8x sur les bénéfices attendus 2024.
Et ces trois sociétés ont une croissance de CA plus forte que celle d'Eviden seule (je ne parle même pas du groupe Atos dans son ensemble)
Eviden surendettée, sur la base d'un PER théorique très généreux de 12x ses bénéfices 2024 devrait se payer environ 700 millions d'€ (pour une valeur d'entreprise de 3,5 milliards environ), soit un cours de bourse autour de 7-8€/action.
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