chaudard
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Article Challenges du 15/02/2017
https://www.challenges.fr/entreprise/aeronautique/tci-le-fonds-activiste-qui-veut-la-peau-de-la-fusion-safran-zodiac_454453.amp
TCI, le fonds activiste qui veut la peau de la fusion Safran-Zodiac
Par Vincent Lamigeon
Publié le 15.02.2017 à 12h39
TCI conteste le rachat de Zodiac par Safran, qu’il juge "surpayé" et "non rationnel". Une vieille habitude pour ce fonds activiste de 10 milliards de dollars, qui avait déjà harcelé Volkswagen, Airbus Group ou ABN Amro.
Qu'on se le dise, TCI est de retour aux affaires. Le fonds activiste britannique, actionnaire à 4,1% de Safran, avait déjà attaqué le groupe français en octobre 2012, le prévenant qu'il ne tolèrerait pas de nouvelles acquisitions. Il a récidivé mardi 14 février, en envoyant une lettre à l'AMF et au président du conseil d'administration de Safran Ross McInnes pour contester le projet de fusion avec Zodac Aeropsace annoncé le 19 janvier dernier. "Safran a une position solide sur le marché, un "pricing power" significatif et a généré une activité après-vente très rentable et prévisible depuis 25 ans, écrit le patron du fonds, Christopher Hohn, dans sa lettre au président du groupe. Il est donc inexplicable que vous vouliez diluer la qualité du business de Safran, en rachetant à un prix excessif une activité d'intérieurs d'avions en difficulté."
Sur un site internet dédié, astrongersafran.com, TCI (The Children's Investment Fund) détaille ses arguments sur 47 pages. Et le fonds ne fait pas dans la dentelle. Un, Zodiac est surpayé, assure-t-il: 29,47 euros par action, quand le "prix juste" serait plutôt de 20 euros. Deux, le rachat implique un "énorme risque d'exécution", avec un objectif de retour à une marge de 12% sur les activités intérieurs d'avions peu crédible. "Safran n'a fait que très peu de due diligence, n'a aucune expérience de la fabrication de sièges et de cabines, et a un historique épouvantable sur l'intégration des acquisitions", assène ainsi TCI.
"Très haut niveau de dette"
Trois, l'intégration de Zodiac dégraderait le modèle économique de Safran. Contrairement aux énormes barrières d'entrée sur le segment des moteurs dont bénéficie Safran, avec un duopole Safran-GE / Pratt& Whitney sur les réacteurs de monocouloirs, Zodiac est plus exposé à la concurrence, avec une forte pression sur les prix de la part d'Airbus et Boeing, estime le fonds. TCI assure aussi que l'opération aboutirait à "très haut niveau de dette", soit 7 milliards d'euros environ, et à un très mauvais retour sur capitaux investis.
Conclusion du fonds activiste: Safran serait bien inspiré d'abandonner la fusion avec Zodiac… et de faire remonter du cash aux actionnaires. TCI, qui estime le potentiel de l'action du groupe à 100 euros, contre 65 aujourd'hui, réclame donc un programme de rachat d'actions de 11% des actions du groupe (soit près de 3 milliards d'euros au cours actuel). Soit le produit de la vente de l'ex-division sécurité Morpho à Oberthur-Advent (identification, biométrie) et Smiths (détection).
Opération "inéquitable", voire "cynique"
Pour arriver à ses fins, TCI veut obliger Safran à organiser un vote de ses actionnaires en amont de l'opération. "Il serait inéquitable, et pour tout dire cynique, de proposer un vote sur la fusion avec Zodiac Aerospace après le lancement et l'éventuel succès de l'offre publique", écrit Christopher Hohn. Qui dénonce le "traitement préférentiel réservé aux actionnaires familiaux de Zodiac Aerospace", qui n'apporteront pas leurs titres à l'OPA, et resteront actionnaires du nouveau groupe.
Chez Safran, on se refuse à commenter l'offensive de TCI. Celle-ci a de toute façon peu de chances d'aboutir, estime Christophe Ménard, analyste chez Kepler Cheuvreux : "Nous voyons la fusion Zodiac-Safran comme une opération critique du point de vue du gouvernement français, destinées à renforcer le secteurs aérospatial français", écrit-il dans une note à ses clients. L'analyste reste confiant sur la capacité du patron de Safran Philippe Petitcolin, à redresser Zodiac et obtenir les 200 millions d'euros de synergies promises.
Volkswagen aussi visé
Ce n'est pas la première fois que TCI s'attaque à un gros poisson. En 2007, il avait demandé la tête du patron de la banque néerlandaise ABN Amro. En 2013, le fonds avait fait le siège d'Airbus Group, alors EADS, pour qu'il vende sa participation dans Dassault Aviation. En mai 2016, il avait envoyé une lettre au management et au conseil de surveillance de Volkswagen, dont il détient 2% du capital, pour éreinter "six ans de stabilité des profits" et un management "sous-performant et surpayé" (400 millions d'euros en six ans pour les neuf membres du comité exécutif, selon ses calculs). Le fonds britannique avait aussi dézingué la politique d'acquisitions de Safran fin 2012, qualifiant de "désastreuse" la fusion Snecma- Sagem, et de "très mauvaises" les acquisitions de champions américains de la sécurité, comme L1. TCI s'opposait aussi à une éventuelle fusion avec Thales et, déjà, à une opération Zodiac, "une société de qualité globalement inférieure à Safran".
Article Les Échos du 2 octobre 2019
https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/activistes-le-%20temoignage-choc-du-patron-de-safran-1136701
Activistes : le témoignage choc du président de Safran
Le hedge fund de Christopher Hohn est actionnaire de Safran depuis 2012. Ross McInnes, président de Safran, admet qu'avoir TCI comme actionnaire l'a aidé à faire baisser le prix de Zodiac.
Difficile, en entendant le président de Safran Ross McInnes parler aujourd'hui de ses relations avec l'activiste TCI, d'imaginer combien, deux ans plus tôt, l'affrontement était brutal. Entré au capital de l'entreprise cinq ans plus tôt, Christopher Hohn, fondateur du très redouté fonds activiste était alors parti en croisade contre le projet de mariage entre Zodiac et Safran dont il détenait 4 %. De manière très agressive : convaincu que Zodiac ne valait pas plus de 10 euros quand Safran en proposait 27, il a interpellé le gendarme boursier, réclamé le départ de Ross McInnes, et recommandé que le bonus de ce dernier soit indexé en fonction de la réalisation d'objectifs liés à Zodiac. La menace de poursuites judiciaires à l'encontre des membres du conseil d'administration a même été brandie. A l'époque, Ross McInnes avait parlé de campagne de « dénigrement ».
TCI actionnaire depuis sept ans de Safran
De tout cela, le président de Safran ne semble plus se souvenir. Cela fait sept ans que The Children's Investment (TCI) est actionnaire de Safran. « Je ne souscris pas à cette description d'un activiste comme un actionnaire menaçant. On ne peut pas se contenter d'un sous-entendu péjoratif. C'est avant tout un actionnaire actif » indique-t-il aux « Echos », deux ans après avoir livré à son actionnaire une guerre de communication.
« TCI est entré à notre capital en 2012. Leur perspective était celle d'un actionnaire de long terme. Ils avaient investi car ils considéraient que l'aéronautique avait un fort potentiel de rentabilité et que Safran recelait un potentiel d'appréciation significatif. A l'époque, le titre valait environ 30 euros, aujourd'hui il vaut plus de 140 euros ». A l'époque, « ils nous ont envoyé un courrier posant des questions légitimes. Ils réclamaient la cession des 22 % détenus dans Ingenico. Notre seule divergence d'opinions avec TCI était sur le calendrier. Nous étions tout à fait d'accord sur le principe que nous n'avions pas vocation à investir en minoritaire. Mais nous étions au conseil d'Ingenico et ne pouvions céder nos titres quand nous le souhaitions. Nous l'avons fait deux ou trois ans plus tard ».
https://www.challenges.fr/entreprise/aeronautique/tci-le-fonds-activiste-qui-veut-la-peau-de-la-fusion-safran-zodiac_454453.amp
TCI, le fonds activiste qui veut la peau de la fusion Safran-Zodiac
Par Vincent Lamigeon
Publié le 15.02.2017 à 12h39
TCI conteste le rachat de Zodiac par Safran, qu’il juge "surpayé" et "non rationnel". Une vieille habitude pour ce fonds activiste de 10 milliards de dollars, qui avait déjà harcelé Volkswagen, Airbus Group ou ABN Amro.
Qu'on se le dise, TCI est de retour aux affaires. Le fonds activiste britannique, actionnaire à 4,1% de Safran, avait déjà attaqué le groupe français en octobre 2012, le prévenant qu'il ne tolèrerait pas de nouvelles acquisitions. Il a récidivé mardi 14 février, en envoyant une lettre à l'AMF et au président du conseil d'administration de Safran Ross McInnes pour contester le projet de fusion avec Zodac Aeropsace annoncé le 19 janvier dernier. "Safran a une position solide sur le marché, un "pricing power" significatif et a généré une activité après-vente très rentable et prévisible depuis 25 ans, écrit le patron du fonds, Christopher Hohn, dans sa lettre au président du groupe. Il est donc inexplicable que vous vouliez diluer la qualité du business de Safran, en rachetant à un prix excessif une activité d'intérieurs d'avions en difficulté."
Sur un site internet dédié, astrongersafran.com, TCI (The Children's Investment Fund) détaille ses arguments sur 47 pages. Et le fonds ne fait pas dans la dentelle. Un, Zodiac est surpayé, assure-t-il: 29,47 euros par action, quand le "prix juste" serait plutôt de 20 euros. Deux, le rachat implique un "énorme risque d'exécution", avec un objectif de retour à une marge de 12% sur les activités intérieurs d'avions peu crédible. "Safran n'a fait que très peu de due diligence, n'a aucune expérience de la fabrication de sièges et de cabines, et a un historique épouvantable sur l'intégration des acquisitions", assène ainsi TCI.
"Très haut niveau de dette"
Trois, l'intégration de Zodiac dégraderait le modèle économique de Safran. Contrairement aux énormes barrières d'entrée sur le segment des moteurs dont bénéficie Safran, avec un duopole Safran-GE / Pratt& Whitney sur les réacteurs de monocouloirs, Zodiac est plus exposé à la concurrence, avec une forte pression sur les prix de la part d'Airbus et Boeing, estime le fonds. TCI assure aussi que l'opération aboutirait à "très haut niveau de dette", soit 7 milliards d'euros environ, et à un très mauvais retour sur capitaux investis.
Conclusion du fonds activiste: Safran serait bien inspiré d'abandonner la fusion avec Zodiac… et de faire remonter du cash aux actionnaires. TCI, qui estime le potentiel de l'action du groupe à 100 euros, contre 65 aujourd'hui, réclame donc un programme de rachat d'actions de 11% des actions du groupe (soit près de 3 milliards d'euros au cours actuel). Soit le produit de la vente de l'ex-division sécurité Morpho à Oberthur-Advent (identification, biométrie) et Smiths (détection).
Opération "inéquitable", voire "cynique"
Pour arriver à ses fins, TCI veut obliger Safran à organiser un vote de ses actionnaires en amont de l'opération. "Il serait inéquitable, et pour tout dire cynique, de proposer un vote sur la fusion avec Zodiac Aerospace après le lancement et l'éventuel succès de l'offre publique", écrit Christopher Hohn. Qui dénonce le "traitement préférentiel réservé aux actionnaires familiaux de Zodiac Aerospace", qui n'apporteront pas leurs titres à l'OPA, et resteront actionnaires du nouveau groupe.
Chez Safran, on se refuse à commenter l'offensive de TCI. Celle-ci a de toute façon peu de chances d'aboutir, estime Christophe Ménard, analyste chez Kepler Cheuvreux : "Nous voyons la fusion Zodiac-Safran comme une opération critique du point de vue du gouvernement français, destinées à renforcer le secteurs aérospatial français", écrit-il dans une note à ses clients. L'analyste reste confiant sur la capacité du patron de Safran Philippe Petitcolin, à redresser Zodiac et obtenir les 200 millions d'euros de synergies promises.
Volkswagen aussi visé
Ce n'est pas la première fois que TCI s'attaque à un gros poisson. En 2007, il avait demandé la tête du patron de la banque néerlandaise ABN Amro. En 2013, le fonds avait fait le siège d'Airbus Group, alors EADS, pour qu'il vende sa participation dans Dassault Aviation. En mai 2016, il avait envoyé une lettre au management et au conseil de surveillance de Volkswagen, dont il détient 2% du capital, pour éreinter "six ans de stabilité des profits" et un management "sous-performant et surpayé" (400 millions d'euros en six ans pour les neuf membres du comité exécutif, selon ses calculs). Le fonds britannique avait aussi dézingué la politique d'acquisitions de Safran fin 2012, qualifiant de "désastreuse" la fusion Snecma- Sagem, et de "très mauvaises" les acquisitions de champions américains de la sécurité, comme L1. TCI s'opposait aussi à une éventuelle fusion avec Thales et, déjà, à une opération Zodiac, "une société de qualité globalement inférieure à Safran".
Article Les Échos du 2 octobre 2019
https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/activistes-le-%20temoignage-choc-du-patron-de-safran-1136701
Activistes : le témoignage choc du président de Safran
Le hedge fund de Christopher Hohn est actionnaire de Safran depuis 2012. Ross McInnes, président de Safran, admet qu'avoir TCI comme actionnaire l'a aidé à faire baisser le prix de Zodiac.
Difficile, en entendant le président de Safran Ross McInnes parler aujourd'hui de ses relations avec l'activiste TCI, d'imaginer combien, deux ans plus tôt, l'affrontement était brutal. Entré au capital de l'entreprise cinq ans plus tôt, Christopher Hohn, fondateur du très redouté fonds activiste était alors parti en croisade contre le projet de mariage entre Zodiac et Safran dont il détenait 4 %. De manière très agressive : convaincu que Zodiac ne valait pas plus de 10 euros quand Safran en proposait 27, il a interpellé le gendarme boursier, réclamé le départ de Ross McInnes, et recommandé que le bonus de ce dernier soit indexé en fonction de la réalisation d'objectifs liés à Zodiac. La menace de poursuites judiciaires à l'encontre des membres du conseil d'administration a même été brandie. A l'époque, Ross McInnes avait parlé de campagne de « dénigrement ».
TCI actionnaire depuis sept ans de Safran
De tout cela, le président de Safran ne semble plus se souvenir. Cela fait sept ans que The Children's Investment (TCI) est actionnaire de Safran. « Je ne souscris pas à cette description d'un activiste comme un actionnaire menaçant. On ne peut pas se contenter d'un sous-entendu péjoratif. C'est avant tout un actionnaire actif » indique-t-il aux « Echos », deux ans après avoir livré à son actionnaire une guerre de communication.
« TCI est entré à notre capital en 2012. Leur perspective était celle d'un actionnaire de long terme. Ils avaient investi car ils considéraient que l'aéronautique avait un fort potentiel de rentabilité et que Safran recelait un potentiel d'appréciation significatif. A l'époque, le titre valait environ 30 euros, aujourd'hui il vaut plus de 140 euros ». A l'époque, « ils nous ont envoyé un courrier posant des questions légitimes. Ils réclamaient la cession des 22 % détenus dans Ingenico. Notre seule divergence d'opinions avec TCI était sur le calendrier. Nous étions tout à fait d'accord sur le principe que nous n'avions pas vocation à investir en minoritaire. Mais nous étions au conseil d'Ingenico et ne pouvions céder nos titres quand nous le souhaitions. Nous l'avons fait deux ou trois ans plus tard ».